La France méprise les Catalans

 

C'est INSUPPORTABLE ! Hier soir au journal du 20 h de l’A2 dans le reportage sur les manifestations organisées ce samedi en faveur des langues dites « minoritaires » ou "régionales", la Catalogne a été, comme toujours, la grande oubliée ! On a pu voir dans ce reportage de l'A2 nos amis Bretons, Corses, Basques mais aucun Catalan ! Et pourtant la manifestation de Perpignan n’avait rien à envier aux autres, comme on peut le voir avec l’article de l'Indépendant et les photos publiées ICI. FR3 région a aussi fait un reportage dans son édition en Catalan, c’est le seul reportage TV sur Perpignan, du moins à ma connaissance.

 J’avoue que lorsque j’ai entendu au micro du reporter de l'A2 un manifestant Breton revendiquer, à juste titre, sa fierté d’être Breton avant d’être français et promettre que désormais les bretons n’accepteraient plus que leur langue soit combattue et méprisée par l’état français, je me lamentais qu’aucun Catalan n’ait pu faire le même genre de déclaration, puisqu'au risque de me répéter l’A2 n'a pas jugé intéressant d’inclure les Catalans dans son reportage !

Scandaleux ? OUI, assurément !

Etonnant ? Pas vraiment quand on sait qu’il y a 353 ans, la Catalogne coupée en deux par l’Espagne et la France et annexée au nord par la France, fut désignée en tant que « nouvelle province française étrangère » dans le Traité qui ratifiait la forfaiture de cette annexion. Pourquoi une telle précision ? Pour la raison que le qualificatif d’« étrangère » obligeait les Catalans à continuer de régler les taxes imputées aux étrangers en plus des lourds impôts qui leur étaient infligées du fait de leur nouveau statut de « sujets du roi louis le 14e ». Le terme "étrangère" n'a jamais été supprimé ! Un oubli révélateur de l'esprit colonialiste des français puisque les gouvernements successifs, qu’ils soient royalistes, impériaux ou républicains de gauche comme de droite, ont toujours eu la même constance dans l’hypocrisie, le mensonge, l’abus de pouvoir et la cupidité à toujours prendre sans rien donner aux Catalans qui, aujourd'hui encore, est un des départements les plus pauvres de l'hexagone et le plus frappé par le chômage juste avant l'Aude ! 

Ce qui est le plus douloureux est que les héritiers du traître RamonTrobat*, de triste mémoire pour nous Catalans, sont toujours très actifs à s'acharner contre la Catalogne, leur véritable Patrie, au profit de la France ... ceux-là se reconnaîtront !

Evidemment, même si les TV parisiennes nous ont « oubliés », la journée d’hier a été un grand succès et de nombreux Catalans du nord se sont retrouvés au jour J à Perpignan pour dire leur volonté d’être reconnus en tant que Catalan par la reconnaissance officielle de leur langue, de leur culture, de leur Histoire !

Il faut se souvenir qu'aucun des gouvernements français de ces dernières décennies, là encore gauche et droite toujours unies dans le même jacobinisme schizophrène, est un des 3 pays européens à n’avoir pas accepté la reconnaissance des langues régionales … de quoi les français ont-ils peur ?

C'est Joan-Lluis Lluis,   talentueux et bouillonnant écrivain Catalan, qui répond à cette question dans un texte qui stigmatise, bien plus intelligemment que je ne sais le faire, la méfiance de la France vis-à-vis des langues régionales depuis des siècles jusqu'à nos jours.

 

La République n'a pas à avoir peur du catalan par JOAN-LLUIS LLUIS

L’obstination de tant de gouvernements successifs à ne pas vouloir définir une loi-cadre pour les langues dites régionales est devenue, avec le temps, le symptôme d'un aveuglement stérile. La République française n'a rien à perdre à protéger une partie essentielle de son patrimoine, bien au contraire.
La diversité linguistique est une richesse mais une richesse fragile comme une aile de papillon : on sait qu'au cours de ce siècle, une langue disparaîtra toutes les deux semaines. La responsabilité de tous, citoyens, élus et gouvernement est donc de faire que la langue catalane ne soit jamais inscrite sur la triste liste des langues mortes.
La langue catalane ne représente en aucun cas un danger pour la République et il est temps que cette évidence soit reconnue dans les faits : par des lois qui protègent et promeuvent le catalan. La généralisation de son enseignement, sa présence réelle dans les médias publics, sa mise en rue au travers de la signalétique publique sont des conditions basiques, nécessaires et légitimes pour assurer sa continuité tout au long du XXIe siècle. En outre, nous pourrons ainsi profiter des innombrables connexions économiques, culturelles et personnelles qui peuvent être établies avec la Catalogne Sud et qui sont fructueuses pour toute la Catalogne Nord.
La défense du catalan est une cause juste et, aujourd'hui, la France est une exception négative dans la conception la plus moderne de la démocratie. Les plus grandes institutions internationales ont reconnu la nécessité de promouvoir la diversité linguistique à tous les niveaux et par conséquent, les réticences françaises sont de plus en plus incompréhensibles. La République serait plus belle si elle s'ouvrait davantage à sa diversité. Car le catalan ne fait de mal à personne et peut être utile à tout le monde.

 

 

*  Ramon Trobat i Vinyes : le seul Catalan dont le nom figure sur le Traité de Pyrénées tant il a été un bon serviteur de la France durant les tractations qui assassinaient son pays et son peuple