• Après avoir lu la conférence que Mr François Suréda, professeur d'espagnol émérite a eu la gentillesse de me communiquer, je me sens obligée de la publier sur mon blog tant j'en ai trouvé la lecture passionnante.

    Cette conférence, élaborée au cours de travaux en archives, est le résultat de recherches destinées à produire la thèse d'Etat de Mr François Suréda : Le théâtre dans la vie valencienne au XVIIIè siècle, publiée en 2004 par les Presses Universitaires de Perpignan.

    Il est à noter que c'est ce remarquable ouvrage de 631 pages, résultat de quelque douze années de dur labeur, qui valut au Professeur Suréda le titre de Professeur des Universités, ainsi que celui de Professeur  émérite lors de son départ à la retraite.

    La conférence publiée ici est  le résultat de l'étude de divers documents qui n'avaient rien à voir avec la thèse en préparation, mais que Mr Suréda récoltait car il les jugeait utiles pour l'information sur l'histoire du Pays Valencien. La richesse de ce travail a été si bien reconnue en Pays Valencien qu'une traduction pour publication est actuellement en cours.

    Le texte fait indirectement comprendre pourquoi les Catalans sont tellement inquiets du projet du gouvernement européen d'interdire les jeux pyrotechniques sous prétexte de "dangerosité" ! À ce propos, il faudrait que nos gouvernements arrêtent d'interdire tout et n'importe quoi par souci de notre santé, qui soit dit en passant est surtout compromise par les pollutions multiples et variées issues des grands groupes pétro-chimiques et pharmaceutiques auxquels, faut-il le préciser, personne n'interdit de nous tuer à petits feux et de détruire la planète par la même occasion ! Bel exemple de l'hypocrisie dont sont coutumiers nos gouvernants !

    Mais les Catalans font de la résistance et il semble que pour l'instant nos fêtes locales conservent leurs corre focs !

    La Catalane que je suis ne mettra qu'un seul bémol à la remarquable conférence de Monsieur François Suréda, c'est que Jacques 1e le Conquérant est un roi catalan. Mes amis Catalanistes ne m'auraient pas pardonné d'oublier cette précision.

    ◊◊◊


    LES FALLAS DE VALENCIA ET LEUR SIGNIFICATION


    Conférence présentée à MONTPELLIER
    par
    Monsieur François SUREDA
    Professeur émérite de l'Université de PERPIGNAN
    Avril 2000

    à l’invitation de l’inspection générale de l’enseignement de l’Espagnol

    sur le thème
     "La fête dans le monde hispanique"

     

         Les “ fallas ” qui ont lieu chaque année à Valencia dans la deuxième quinzaine du mois de mars, prennent fin dans la nuit de la Saint Joseph, le  19 mars, à la veille de l’arrivée du printemps. Il y a dans cette chronologie toute une série de symboles que nous essaierons d’expliquer.

         Le premier d’entre eux a trait à la signification et à l’importance du feu dans la vie des hommes. Le feu constitue le bien le plus apprécié d’une société en germe car c’est le grand maître qui ne doit jamais quitter la demeure. C’est autour de lui qu’on bâtit une maison, que l’on aménage un foyer. Dans l’Antiquité l’Hestia grecque ou la Vesta romaine était la gardienne du feu, du foyer domestique, et son culte était assuré par les Vestales, ces prêtresses vouées à la chasteté et chargées d’entretenir le feu sacré. Il existait même dans l’antique Rome des fêtes de Vesta appelées Vestalies.

         Chacun sait aussi que, depuis l’homme des cavernes, la nature du feu est ambiguë. C’est un trésor fragile et dangereux, qui doit être maîtrisé et constamment surveillé. Il cuit les aliments, il ramollit les métaux, il génère la vie sociale, mais il ravage et détruit tout ce qu’il touche avec la force de la foudre et la furie d’un fauve vorace.

         Cette nature ambiguë et dangereuse n’a cessé de poursuivre, de fasciner et de séduire les hommes qui ont engagé des combats dans d’authentiques “pyromachies”. Les peuples jouent avec le feu, l’adorent et le vénèrent, droguent leur esprit dans les rites publics par ces messages occultes, secrets qu’exprime le langage des flammes. Ainsi du feu outil qui illumine dans la nuit, qui transforme la maison en foyer accueillant durant les longues nuits d’hiver, qui durcit le bois et forge les métaux, qui prend les multiples facettes de l’énergie physico-chimique, nous passons au feu “ symbolique ” et expressif, qui enflamme et nourrit les rêves diurnes, qui lutte contre les pulsions d’une collectivité.

         Quand le feu apparaît sur une place, un lieu public, il se vêt d’un habit de lumières et parle un langage particulier. Le feu devient fête et donne un sens à la vie quotidienne. C’est alors que le feu est art, beauté, fantaisie, fracas, clameurs, passion inutile qui ravit le cœur de celui qui participe à la fête.

         La fête valencienne d’hier et d’aujourd’hui, et du nord au sud du Pays Valencien, gravite autour du feu. Malgré la modernisation et la transformation de la société, la présence du feu festif est toujours de rigueur. Comme la lumière ou comme l’énergie, il est un instrument au service de la fête collective.

     

         Le feu en cette région méridionale avait aussi sous l’ancien régime, aux XVIe, XVIIe,et XVIIIe siècles, une importance considérable. A cette époque-là, tout le littoral valencien était fortifié par des châteaux et des tours de vigie. De loin en loin, de nuit comme de jour, ces tours de guet permettaient de surveiller l’horizon et de détecter la présence de navires pirates. On dénombre quelque 68 tours tout au long de ce littoral. Elles constituaient un authentique système de défense qui utilisait le feu comme moyen de communication. C’est un fait très connu y compris sur notre littoral de la Côte Vermeille, où les tours de la Madeloc et de la Massane érigées sur les sommets des Albères jouaient un rôle similaire dans des temps très anciens. Selon des documents d’archives, on avait mis au point, en cette région du Levant espagnol, un système utilisé déjà par les Maures. C’étaient les “ ahumadas ”, les “ fallas ”, ou “ hogueras ” qui annonçaient immédiatement une menace ou un événement imprévu. Un feu ou “ falla ” diurne, à une heure convenue, était synonyme d’un message signifiant “ rien à signaler ”, que les gardiens de ces tours se transmettaient les uns aux autres. Si on allumait deux “ hogueras ”, c’est-à-dire deux brasiers, c’était la signification du contraire, et le signal prévenait les autres vigies de toute menace éventuelle. Mais si le guetteur jetait du haut de sa tour les brandons, soit les débris enflammés de son feu, c’est qu’il y avait grand péril en la demeure et que des Maures avaient débarqué sur le rivage. A ce signal, tous les garde-côtes affluaient vers la tour qui avait donné l’alerte.

         C’est le rôle que jouait la “ falla del Micalet ”, c’est-à-dire le feu que l’on allumait chaque jour sur la tour de la cathédrale de Valencia pour informer les habitants de la ville et de l’arrière-pays des dangers éventuels qui planaient sur la population. Lorsque les menaces de la piraterie disparurent – à la fin du XVIIIe siècle il y avait encore des incursions et des razzias sur le littoral – le Conseil municipal (“ el Cabildo ”) décida de maintenir la “ hoguera ” dans un but bien précis, à savoir prévenir les navigateurs et les habitants de la “ huerta ” de l’heure de l’angélus. Au début du XIXe siècle, le sonneur de cloches se contentait de faire trois ou quatre fois le tour du campanile où étaient logées les grandes cloches, avec une torche de paille enflammée. La “ falla del Micalet ” cessa de s’allumer vers 1835.

         C’est à  partir de 1880 que les “ fallas ” et leurs bonshommes de paille et de toile furent brûlés la nuit même de la Saint Joseph. On avait coutume auparavant d’allumer les feux le 18 mars, c’est-à-dire la veille.

     

         Les “ fallas ” valenciennes ont une particularité qui fait d’elles une manifestation populaire chargée de symboles et de signification sociale. Elles se distinguent des feux de la Saint Jean en ce qu’elles n’ont pas le même contenu anthropologique. Autour de la nuit de la Saint Jean se greffent des messages anciens qui parlent de stérilité, de fécondité, de reproduction, de la santé et de la vie communautaire dans sa continuité. Le solstice d’été favorise les rêves et les espoirs d’une collectivité. En ce qui concerne les “ fallas ” valenciennes, il convient de souligner qu’elles se situent à la veille du printemps, annonciateur de renouveau et de la montée de la sève.

         Les historiens qui se sont appliqués à analyser les théories interprétatives des fêtes européennes du feu, considèrent que l’hypothèse dite purificatrice semble être celle qui s’accorde à la réalité. Selon cette théorie, l’application du feu sous la forme de brasiers, de torches ou autres variétés, serait un résultat indirect que l’on obtient en libérant les pouvoirs de reproduction des plantes et des animaux du pouvoir mortifère de la sorcellerie. De cette façon, les rites du feu constitueraient en général une crémation par le feu des “ ninots ”, pantins, bonshommes de paille ou personnages en effigie.

         Les modernes “ fallas ” de Valencia et les “ fogueres ” d’Alicante seraient-elles la survivance des rites de crémation de quelque dieu végétal destiné à assurer la fertilité des champs ? Sommes nous, serions nous en présence de rites purificateurs et sacrificiels dont la signification originelle s’est perdue avec le temps ? Plutôt que de se confiner dans un domaine de la pensée où les élucubrations les plus éthérées, les plus vaporeuses peuvent se donner libre cours, tenons-nous en à un contexte historique et sociologique moins abstrait.

         Il semble que la signification de cette fête des “ fallas ” soit plus simple. Exposer à la vindicte publique, clouer au pilori des pantins ou des mannequins qui finissaient par être détruits par des pétards ou par le feu était une pratique rituelle largement répandue dans tout le folklore européen. Judas, Carnaval ou Carême sont toujours brûlés dans nombre de cités. A travers leur crémation, on blâmait et on brûlait les vices et les comportements que la collectivité considérait comme intolérables. Ces feux satiriques étaient de véritables rituels d’exécution publique au travers desquels la population pratiquait l’exercice de la justice populaire.

         Quiconque transgressait les règles, les us et coutumes ou le code imposé par la tradition, s’exposait au blâme, à la critique socialement réglée à une époque où l’on n’avait pas encore sacralisé la vie privée et établi l’inviolabilité de la vie privée de l’individu. Dans la société traditionnelle, la séparation, la destination entre domaine privé et domaine public était loin d’apparaître clairement. La communauté, en invoquant la coutume et le sens commun, s’immisçait dans la vie de ses membres. Tel est le contexte qui caractérise tous ces rites satiriques, et c’est là que réside, à n’en pas douter, l’origine des “ fallas ” monumentales de la cité de Valencia.

         Tirer avec des armes à feu pour exprimer sa joie, sa satisfaction, a été de tout temps une manifestation commune à toutes les cultures qui ont connu la poudre. A Valencia, plus particulièrement, il convient d’ajouter divers spectacles pyrotechniques tels que “ mascletaes ”, “ tracas ” et “ castillos de fuego ”, c’est-à-dire chapelets de pétards fixés sur des fils tendus d’un bord à l’autre d’une place ou d’une rue, et des pièces d’artifice.

     

         Avant de vous présenter les différentes théories sur l’origine des “ fallas ” et d’en décrire le contenu, je voudrais simplement, sans érudition excessive, expliquer l’étymologie de ce mot  qui caractérise un grand moment de la vie de la troisième ville d’Espagne, qui voit affluer en son sein, chaque mois de mars, des milliers de touristes venus du monde entier.

         Dans la Valencia d’autrefois, comme dans la Valencia moderne, le feu de la fête était désigné par deux vocables : “ la foguera ” ( en espagnol “ hoguera ”) dérivé du mot générique “ foc ” (focus en latin) et par “ falla ”. Les deux ont été confondus à travers les siècles car ils avaient le même sens. La “ falla ” désigne aussi bien les foyers, les brasiers qui brûlent des vieux objets, des meubles démantibulés, des caisses, etc., que la torche ou le flambeau  qui éclaire les danses de rue. Toutefois, à Valencia c’est le mot “ falla ” ou “ falles ” (pluriel) qui a perduré pour désigner la grande fête qui nous intéresse aujourd’hui. Ce mot vient du latin “ facula ”, diminutif de faxcis qui signifie torche et qui par évolution a donné “ fácila ”, puis “ fáyla ”, “ fála ” ( Lérida et Valencia) ; “ fáya ” ( Barcelone et Majorque).

         C’est Jacques  1er, le Conquérant, libérateur de la ville en 1238, qui apporte le mot de “ falla ” désignant une torche, aussi bien celle qui servait à éclairer les tentes de campagne et les maisons, que celle qui éclairait, illuminait une fête ou annonçait une nouvelle. Ces sens primitifs ont traversé les siècles jusqu’à nos jours.

         Au XVIe siècle, ces mots désignent les feux de joie qu’on allumait pour annoncer ou célébrer une victoire ; ils désignaient autant les bûchers de la Saint Jean que ceux de la nuit de la Saint Joseph. Mais, par la suite, “ falla ” en vint à désigner, de façon plus restrictive, le foyer satirique qui brûlait des bonshommes dans des scènes répréhensibles ou ridicules. Au pied de ces pantins, on avait au XVIIIe siècle accroché des écriteaux où des commentaires en vers dénonçaient les travers des personnages ou les critiques dont ils faisaient l’objet. La pratique de ces libelles a toujours cours à notre époque où les artistes valenciens rivalisent d’ingéniosité pour adresser des piques aussi bien au monde politique qu’aux pratiques  préjudiciables à la société.

     

         Au XIXe siècle, on commence à faire la distinction entre les “ fallas ” artistiques élaborées avec des “ ninots ” ou personnages en forme de pantins ou de marionnettes, et les “ fallas ”, simples foyers ou feux de joie. Le mot de “ foguera ” tend à disparaître pour ne désigner que le feu simple, tel qu’on l’organise de nos jours dans chacun de nos villages, la nuit de la Saint Jean.

         A notre connaissance, l’origine des “ fallas ” n’est pas encore de nos jours clairement définie, malgré les recherches sérieuses qui ont pu être effectuées. Plusieurs hypothèses s’affrontent :

         La corporation des charpentiers -menuisiers aurait fait le feu en l’honneur de son saint patron, Joseph. L’origine remonterait au Moyen-Âge, à l’époque où les corporations de métiers connurent leur plus grande splendeur.

    Théorie solaire : il s’agirait de feux de brasiers soumis au rythme des équinoxes et des solstices, feux que le christianisme s’appropria pour les dédier aux saints, St Antoine, St Joseph, St Jean.

    Théorie du “ ninot ”, le mannequin, le pantin représentait Luther, Mahomet, Judas. Au XVIIe siècle, c’était souvent la grossière copie d’un autodafé . A travers un acte de violence symbolique on détruisait parfois l’emblème du mal.

     

         Toutes ces théories ne reposent pas sur des fondements indiscutables.

    En 1806, un voyageur français, Laborde, décrit la célébration de la fête de Saint Joseph, qui se situait, à l’époque, la veille, soit le 18 mars. Les menuisiers confectionnaient de véritables mannequins de bois revêtus de cartons peints, qu’ils installaient sur une sorte d’estrade qui simulait  la scène d’un théâtre. On peut imaginer qu’ils profitaient de l’occasion pour débarrasser leurs ateliers des copeaux ou des morceaux de bois inutilisables afin d’alimenter le feu.

         Il est surprenant de constater qu’à Port-Saïd, ce port d’Égypte à l’entrée du canal de Suez, cette pratique ancienne des feux de joie a connu une évolution comparable à celle des “ fallas ” de Valencia. Les personnages que l’on brûlait, il y a quelques années, étaient des effigies de Golda Meir, Moshe Dayan, Beguin , etc .,personnalités politiques que les Egyptiens ne portaient pas dans leur cœur. Les éléments communs avec le rituel valencien sont incontestables. Les marionnettes s’appellent là-bas Allenby(s), du nom d’un ancien maréchal anglais (1861-1936), premier vicomte d’Allenby, qui ne devait pas être en odeur de sainteté dans cette région du Moyen-Orient où il avait participé à des campagnes militaires et politiques.

         En Angleterre également, à notre époque, des manifestations qui ont lieu le 5 novembre présentent quelques similitudes avec les “ fallas ”. Il semblerait que les “ fallas ” commencent à s’universaliser. En effet, la ville d’Osaka au Japon a voulu reproduire en 1990 la “  fiesta fallera ”, grâce à l’aide d’artistes valenciens engagés pour superviser la fête.

     

         Quoi qu’il en soit, l’origine des “ fallas ”, malgré toutes les hypothèses avancées reste une inconnue. Toujours est-il qu’elles ont traversé les siècles et les continents et qu’elles constituent, encore de nos jours, un spectacle populaire, multiple et varié, dont l’impact en Europe et dans le monde est à peu près comparable à celui du Carnaval de Venise. Nous n’avons pas le temps de faire ici un historique des “ fallas ” qui se sont succédé au long des XIXe et XXe siècles. Bornons nous à dire que de 1850 à 1870 on a privilégié la “ falla ” érotique, la “ falla ” politique, la “ falla ” critique sociale, la “ falla ” humoristique, avec présentation de tous les maux de la société : débordements sociaux, excès, beuveries, passions excessives, toros, adultères, infidélité conjugale. Les “ fallas  apologétiques ont eu leur heure de gloire (apologie d’une personne, d’une doctrine) tout comme les “ fallas ” historiques ont aujourd’hui conquis le droit de cité. Le spectacle des “ fallas ” a connu quelques vicissitudes notamment en 1875 à l’époque de la Restauration où s’est exercée une répression de la culture populaire, qui ne pouvait plus donner libre cours à la critique politique et anticléricale. La “ falla ” politique reprit des couleurs de 1890 à 1900 avec en primeur la critique de la politique nationale et locale, des conditions de vie ainsi que de la spéculation foncière.

     

         Il existe aussi la “ falla ” purement artistique dénuée de toute critique, véritable œuvre d’art réalisée par des artistes compétents, décorateurs, sculpteurs, modélistes, peintres, scénographes, plasticiens, etc. C’est l’œuvre de professionnels, d’hommes de l’art, qui exercent leurs talents dès les premières décennies du XXe siècle. Peu à peu s’efface la critique sociale ou locale.

         Pendant les vingt premières années de la dictature franquiste, les thèmes licencieux ou critiques seront soumis à une rigoureuse censure. La caricature d’hommes politiques en vue est formellement interdite, tout comme sont prohibées les “ fallas ” trop populaires.

         De 1959 à 1975 les « fallas »  prennent des proportions de plus en plus importantes. Elles deviennent même colossales en 1970 (Colosse de Rhodes), année à partir de laquelle la caricature commence à se frayer un timide chemin.

     

         Avec le retour de la démocratie, et donc de la liberté, 360 à 370 points névralgiques dans la ville sont choisis où apparaissent autant de“ fallas ” montées par les associations de quartier. Le prix de ces dernières varie de cinq à 12 millions de pesetas, soit l’équivalent de 200.000 à 600.000 francs. Une même “ falla ”, dont la hauteur peut atteindre la hauteur d’un immeuble de huit à dix étages, mêle dans sa structure monumentale des rappels historiques, un hommage à un personnage célèbre et des critiques politiques ou sociales.

         A titre d’exemple, en 1986 Reagan et Brejnev sont les héros d’une fête qui les présente dans une lutte au corps à corps. En 1987, c’est au tour de Jordi Pujol d’avoir la vedette, ainsi qu’au héros de la nouvelle de chevalerie, “ Tirant lo Blanch ”  dont les exploits guerriers ont pour théâtre la terre de Valencia. Il convient de souligner que chaque année certains mannequins, en raison de leur belle facture, échappent à la crémation (“ indultats ”) et vont garnir le musée “ fallero ” de la ville, véritable mémoire des représentations passées.

         Les tableaux variés élaborés tout au long de l’année sont de véritables œuvres d’un art éphémère que réalise une multitude d’artisans et d’artistes experts dans l’art de travailler le polystirène ou polyurétane expansé (“ corcho blanco ”).

     

         Depuis 1945, se greffe aux fêtes du feu et des pétards une cérémonie plus apaisante, qui introduit le religieux au sein de la fête profane par l’offrande des fleurs à la vierge des abandonnés (“ Virgen de los desamparados ”). Par ailleurs, quand la nuit tombe les différentes “ bandas ” (fanfares) parcourent les rues de la ville accompagnées par des enfants, des jeunes gens et jeunes filles en costume folklorique, faisant résonner la cité d’une grande variété de musiques. Le petit film que j’ai réalisé en 1995, présenté à la fin de cet exposé vous donnera un aperçu de la fête.

         Ce qui est impressionnant et difficilement explicable pour un public non averti, c’est le goût ou la passion des Valenciens pour le bruit assourdissant des “ mascletaes ” et l’ardeur que mettent les habitants de certains quartiers pour animer le “ Casal fallero ”, local où se réunissent ceux qui élaborent les différentes “ fallas ”. Ils forment les “ comisiones falleras ” de chacune des rues. Trois cent soixante commissions composées d’adultes et d’enfants regroupent 90.000 personnes impliquées dans la réalisation de cette fête.

     

         Du point de vue économique, la Chambre de Commerce de Valencia a évalué a 27O millions de pesetas l’apport économique des fêtes “ falleras ” en 1994 et à 295 millions en 1995.

         Qu’il me soit permis de souligner, pour conclure cet exposé forcément incomplet, que nombre de Valenciens des classes moyennes et notamment mes collègues de l’Université fuient la ville à cette époque pour échapper à la cohue et au tohu-bohu produits par ces journées, au cours desquelles la vie à Valencia est particulièrement agitée.

     

                    

     

     

     

     
    Yahoo!

    1 commentaire